Est-ce trop demander?

« Travailler à soi-même, ce n’est pas faire preuve d’individualisme morbide. Si la paix s’installe un jour, elle ne pourra être authentique que si chaque individu fait d’abord la paix en soi-même, extirpe tout sentiment de haine pour quelque race ou quelque peuple que ce soit, ou bien domine cette haine et la change en autre chose, peut-être même à la longue en amour – ou est-ce trop demander ? C’est pourtant la seule solution. Je pourrais continuer ainsi des pages entières. Ce petit morceau d’éternité qu’on porte en soi, on peut l’épuiser en un mot aussi bien qu’en dix gros traités. Je suis une femme heureuse et je chante les louanges de cette vie, oui vous avez bien lu, en l’an de grâce 1942, la énième année de guerre. » Hillesum, Etty, Une vie bouleversée.

La pratique de la voie

« Un maître en discipline monastique nommé Yüan interrogea Pai Chang Huai-Hai :
– Maître, vous appliquez-vous à pratiquer la Voie ?
– Oui
– Comment ?
– quand j’ai faim, je mange. Quand je suis fatigué, je dors.
– tout le monde ne fait-il pas les mêmes efforts que vous ?
– Non, pas de la même manière.
– Pourquoi ?
– quand ils mangent, ils pensent à cent choses différentes. Quand ils s’endorment, ils réfléchissent à mille problèmes. Voilà pourquoi ils sont différents de moi.
Le maître en discipline fut réduit au silence. »
Le goût du zen – Recueil de propos et d’anecdotes, Gallimard, 1993

Le puits d’eau vive

« Remarquez bien que chacune de nos âmes contient en quelque sorte un puits d’eau vive ; il y a en elle un certain sens céleste, une image de Dieu enfouie… Il est là, le Verbe de Dieu, et son opération actuelle est de dégager le sable de votre âme à chacun, pour faire jaillir votre source. Cette source est en vous et ne vient pas du dehors, car « le Royaume de Dieu est au-dedans de vous » (Lc 17,21). »

Origène (IVe siècle), Homélies sur la Genèse, 13.

Avoir un centre

« Une vie qui n’a pas de centre, c’est une vie qui n’a pas de sens. La paix (hésychia, pour les Grecs, shalom, pour les Juifs, shanti pour les Indiens), c’est d’être entièrement là…
Faites quelque chose sans être centré (distrait), faites la même chose en étant centré (attentif) – voyez la différence ! L’important, quelle que soit notre pratique, c’est d’être centré. (…)
Le centre n’est pas un point particulier du corps, mais une ouverture, un espace dans lequel nous accueillons tout ce qui est, avec lucidité, gratitude et compassion. Se tenir là où se tient l’astre, ou l’acte immobile, l’acte pur et premier, selon Aristote, « qui fait tourner la terre, le cœur humain et les autres étoiles »… Si ce n’est pas l’Amour, ça lui ressemble… » Jean-Yves Leloup, L’Assise et la marche, Albin Michel, 2011

Celui qui prie n’est jamais totalement seul

« Un premier lieu essentiel d’apprentissage de l’espérance est la prière. Si personne ne m’écoute plus, Dieu m’écoute encore. Si je ne peux plus parler avec personne, si je ne peux plus invoquer personne – je peux toujours parler à Dieu. S’il n’y a plus personne qui peut m’aider – là où il s’agit d’une nécessité ou d’une attente qui dépasse la capacité humaine d’espérer, Lui peut m’aider. Si je suis relégué dans une extrême solitude… ; celui qui prie n’est jamais totalement seul. » Benoît XVI, Spe Salvi, 32